11 juin 2013

Transformation

L'amie de notre fille a deux jeunes moutons. Elle m'a apporté la laine de leur première tonte. Je transforme peu à peu la laine brute en fil à tricoter.

1. La laine est très sale : les agneaux sont dans un enclos d'autant plus boueux que le printemps est maussade cette année. Le tondeur aurait pu éliminer les parties les plus sales de la toison avant de laisser Zohra l'emballer pour moi. Tout ce brun n'est pas que de la terre!



2. La couleur jaune pâle de la laine est due en grande partie à la matière huileuse et graisseuse qui protège bien l'animal de l'humidité.
La laine est très fine et très frisée, ce qui est excellent. Elle est aussi hélàs très courte, et le tondeur a fait beaucoup d'aller-retour : il y a énormément de recoupes, donc de très courtes mèches qui sont très difficile à ôter de la toison, qui rendent le filage beaucoup plus difficile, et qui donneront un effet floconneux au fil final.


3. La laine, lavée plusieurs fois dans des bains très chauds d'eau additionnée de produit vaisselle puis de lessive, et enfin rincée deux fois n'est pas parfaitement propre. Il reste encore beaucoup de matière végétale malgré le temps passé à ôter un à un les insectes, herbes et autres pailles coincées dans la laine. Avec le temps froid et maussade, il faut plusieurs jours pour que la laine sèche.


4. J'ai écharpillé la laine avec mes mains au fur et à mesure que je la passais dans ma cardeuse à tambour. Deux passages pour un résultat plus homogène. Là encore j'ôte des matières indésirables, de plus en plus petites.


La nappe est très mousseuse et douce. Il y a encore un peu de lanoline, ce qui me plait. Elle "pue bon".


5. J'ai filé et retordu deux poignées de la nappe. Le travail n'est pas évident avec des fibres courtes et les flocons de recoupes qui parsèment la nappe. Les restes de débris végétaux également exigent une grande attention. Je n'essaye pas de faire un fil uniforme et laisse passer les imperfections, en ôtant un flocon ici et là, et en m'assurant de tordre la fibre suffisamment pour renforcer le fil résultant. Je pensais faire un fil assez épais, mais la laine semble décider pour moi.


Le fil sur la nappe. Après la photo, il est passé dans un nouveau bain très chaud, avec une bonne dose de produit vaisselle. Je ne veux pas conserver trop longtemps la graisse sur le fil.
Je trouve le fil irrégulier, doux, léger, mousseux et joliment blanc très charmant, mais vraiment très laborieux à obtenir. C'est vraiment dommage que je n'ai pas pu assister à la tonte pour mieux maîtriser cette étape: le travail aurait été bien plus facile et plaisant, et le fil résultant en vaudrait bien plus la peine.


Je trouve très gratifiant de savoir transformer la laine, du dos du mouton au vêtement. C'est à la fois mystérieux, presque magique et très banal et prosaïque.
J'aime aussi surtout travailler devant les enfants. Je transmets un savoir historiquement crucial. Je maintiens en vie nos racines culturelles et fait pousser de nouvelles branches. Je participe à leur prise de conscience que les vêtements ne tombent pas plus du ciel que les frites de la lune. Je leur démontre que "faire" c'est plus amusant et plus intéressant que "acheter".

Bon, je ne suis quand même pas prête à produire les textiles de toute la famille. Je ne suis pas une usine!

Quelle est votre geste ancestral de la semaine? Pétrir votre propre pain? Sculpter une cuillère? Quelle connaissance ancestrale transmettez-vous aux générations futures?
Quelle est votre transformation préférée?

1 commentaire:

kelli ann & lorie a dit…

J'arrive à votre site via. le biais de ma cousine, qui habite au Colorado !! et vive l'internet!! Perso j'aime utiliser une 'nouvelle' techno pour me développer dans qq chose de fondamental, simple, chalereux, community-building, etc. Bravo pour tous vos projets.